Comment Bruxelles se gausse de l'activisme :
la proclamation d'une Marolle autonome et indépendante le 17 février 1918 (suite et fin)
Voici la deuxième partie du texte :
1) La Marolle est constituée en Etat autonome et indépendant.
2) Ses limites définitives seront établies par la conférence de Brest-Lilekezot [jeu de mot sur Brest-Litovsk].
3) Le roi Albert, le Gouvernement du Havre, le Collège échevinal de Bruxelles et tous les gros bonnets de le Stadhuis [Hôtel de Ville] sont foutus à la porte.
4) L'emploi du marollien devient obligatoire et gratuit.
5) Plus aucune gazette ne sera imprimée en français ; cette mesure ne vise ni La Belgique ni Le Bruxellois qui continueront comme par le passé à paraître en pur marollien.
6) Tous les caberdouches seront fermés à 8 heures (heure des montres déposées chez Ma Tante, rue St-Ghislain) [Le Mont de Piété] sauf ceux qui sont fréquentés par les membres du Gouvernement marollien et les Zattekuls [soûlards] du Conseil de Flandre ( Verraad van Vlaanderen).
7) Tous les Brusseleers étant quand même ruinés coucheront désormais sur la paille (en vente 20 francs le kilo à la Scherreweg Zentrale, Chambre n° 100).
8) Tous les réverbères, lanternes et autres vettepottekes [pots à graisse] seront allumés de 8 heures du matin à 8 heures du soir pour empêcher les aéroplanes de voir la lune en plein jour. Pendant la nuit ils seront peints en blanc clair et transparents.
9) La Marolle se considère en état de guerre avec Monaco, Moresnet et son ennemi séculaire : le marquisat de Molenbeek.
10) Tous les sabres en bois du Grand Bazar et les canons de zinc de chez Tietz [magasin rue Neuve] sont confisqués et fondus pour faire de la monnaie.
11) Toutes les libertés sont supprimées.,l'esclavage est rétabli, ceux qui en chocheté diront des choses contraires ou qui seront soupçonnés de travailler contre nous seront déportés ou supprimés.
12) La devise du nouvel Etat marollien est : « Smoel toe ! » [ferme ta g....].
13) La garde civique est rappelée sous les armes d'accord avec les stokagents [agents de police porteurs d'une matraque]. Elle est chargée de l'exécution des présents décrets.
LE NOUVEAU GOUVERNEMENT
Le nouveau suffrage universel étant une vaste blague (voir les études historiques de Son Excellence le Trotski, grand chevalier de l'Aigle Rouge de Prusse) les membres du gouvernement de la Marollie se sont nommés eux-mêmes, à vie, au traitement de 50.000 marks dans l'ordre suivant :
Président du Conseil : Takschijter, dit le roi des tapeurs [Pieter Tack] ;
Ministre de la Guerre : le général Borm Lawijt [August Borms] ;
Ministre de la Musique : Verheest, maître-chanteur [Emile Verhees] ;
Ministre de la Finance : Rosse Boestring, dit Jef den dief [Joseph Van den Broeck];
Ministre des Latrines : Me...de [Hyppoliet Meert];
Ministre des Carottes : Hiel Verneuft [Emile Vernieuwe];
Ministre de la Marine : Chosson, dit l'avaleur de mercure ;
Conservateur des poussières : René de Kleermot [René De Clercq conservateur du musée Wiertz].
Par ordre : le Grand Chancelier,
PITJE SNOT.
(fin du texte)
Les illustrations sont des cartes postales dessinées par A. Perquy. Parues à Amsterdam, elles caricaturent les membres du Conseil de Flandre et particulièrement ceux qui se sont rendus à Berlin le 3 mars 1917 (voir chronique 14-18 n°3) : remarquez le jeu de mots Raad = Conseil et Verraad = trahison sur la cp représentant V. Lambrechts (erreur pour Jacob Lambrichts)